Le projet PREPAR
La Confédération Nationale des Producteurs Agricoles CONAPAC et l’Alliance AgriCongo ont lancé au mois de juin 2015 la deuxième phase d’un projet ‘Synergie et Complémentarité’, financé par la Direction Générale de la coopération au Développement, la DGD du Ministère des Affaires Etrangères du Gouvernement belge. Ce projet est appelé PREPAR, comme il vise la préparation de 6 dossiers de plaidoyer sur les problèmes-clé de l’agriculture familiale, ainsi que la préparation d’une grande campagne de plaidoyer et des leaders paysans qui vont s’y atteler. En toutes lettres le projet s’appelle Projet de Renforcement des capacités d'action politique des Organisations de Producteurs Agricoles et de leurs fédérations nationale et provinciales en RD Congo.
Il n’est donc pas étonnant que les thèmes prioritaires du projet PREPAR coïncident avec les 4 problèmes-clés du secteur agricole. Dans le cadre du projet, 6 dossiers de plaidoyer ciblés seront préparés par les 6 provinces participantes. Et chaque dossier sera enrichi et amendé par les 5 autres provinces avant de lancer la campagne de plaidoyer.
Une nouvelle banque agricole au Congo ?
Le Nord-Kivu a pris à cœur le dossier du crédit agricole. L’hypothèse de départ était la création d’une nouvelle banque de crédit agricole. Vice-Premier ministre et ministre du Budget, Daniel Mukoko Samba, à l'issue d'une réunion lundi 21 janvier 2013 du gouvernement congolais présidée par le Premier ministre Augustin Matata Ponyo Mapon avait fait la déclaration suivante :
Le grand défi, comme nous l'avons dit au début de cette année 2013, c'est la production agricole. Il est donc évident qu'on ne peut pas avoir un secteur agricole florissant sans une structure de crédit agricole. Raison pour laquelle il a été décidé aujourd'hui que la Banque centrale du Congo (BCC) et le ministère des Finances puissent procéder, le plus rapidement possible, au recrutement d'une institution qui aura pour mission de faire naître une banque de crédit agricole.
Cette institution sera différente de la Banque de Crédit Agricole (BCA) "morte", a souligné M. Mukoko.
Depuis cette déclaration ronronnante : plus rien.
Les travaux de l’atelier
Du 21 au 24 septembre 2015, FOPAC-Nord-Kivu, membre de la CONAPAC, et VECO, membre de l’Alliance AgriCongo, ont organisé à Goma le premier atelier du PREPAR pour la Province du Nord-Kivu. Nous avons analysé les problèmes du secteur agricole et l’importance du crédit agricole pour le Congo. Nous avons analysé le sort des banques de crédit agricole au Caméroun, ainsi que les formules de crédit agricoles en Ouganda et au Burkina Faso. Nous avons regardé les offres existantes en crédit agricole au sein des banques commerciales et des IMF. Nous avons pris connaissance d’une étude faite par Rabobank, elle-même une banque coopérative, créée il y a 115 ans par les producteurs agricoles néerlandais. Et nous nous sommes souvenus de la loi agricole, votée au parlement en juin 2011 et promulguée le 24 décembre 2011. Elle est sensée entrer en opération le 24 juin 2012, mais faute de mesures d’application elle est restée lettre morte. Pourtant, dans son chapitre 3, cette loi prévoit la création d’un Fonds National de Développement Agricole, conçu pour financer l’agriculture à des taux d’intérêts préférentiels.
Les délégués des organisations paysannes à l’atelier ont fait les constats suivants :
- une banque de crédit agricole créée et gérée par l’Etat souffrira toujours des mêmes maux qui ont conduit à la disparition des BCA au Congo et au Caméroun. Sa gestion ne sera pas transparente et ce seront encore les grandes entreprises agro-industrielles qui seront privilégiées, vu le penchant bien clair du gouvernement vers les parcs agro-industriels. Un banque de crédits à 100% agricoles amène une concentration de risques qui menace la survie de l’initiative.
- les banques commerciales aujourd’hui donnent bien des crédits de campagne pour la collecte et la transformation des produits agricoles et des crédits d’investissements, mais elles ont peur du crédit à la production agricole. Pourtant, en Ouganda et au Burkina, des banques commerciales ont bien fait le pas, et ne l’ont pas regretté. Nous avons analysé les conditions de réussite et nous avons constaté que leur portefeuille pour le crédit agricole ne dépasse pas les 20% de leur enveloppe de crédit totale. Aussi ont-elles adopte des méthodes d’approbation et d’accompagnement de proximité par des agronomes au service des banques. Mais elles se confinent aux centres urbains et restent largement absentes des zones rurales. Si on pouvait résoudre leur besoin en garanties pour le crédit agricole à la production, elles seraient intéressées.
- les institutions de micro-finance de toutes sortes se développent partout en RDC. COOCEC, AVEC, MUSO, elles sont nombreuses et certaines comme la CECAFEP sont même des initiatives paysannes. Elles ne sont pas encore très actives en matière de crédit agricole, toujours effrayées par les risques, mais elles sont bien plus proches de producteurs et pourraient ainsi jouer un rôle de suivi de proximité.