PASA-NK : ce que fera Rikolto dans la filière café arabica

PASA-NK : ce que fera Rikolto dans la filière café arabica

06/09/2019
Merveille Saliboko
Merveille Saliboko
Communications Officer & Journalist in DR Congo

Financé par le Fonds international pour le développement de l’agriculture, FIDA, le Projet d’appui au secteur agricole au Nord-Kivu, coordonné par le gouvernement de la RDC, a pour objectif de promouvoir les filières porteuses en assurant la sécurité alimentaire et la réduction de la pauvreté. Rikolto en RDCongo est chef de file pour le café arabica.

Les résultats que Rikolto a déjà obtenus dans la filière ont été à la base de la sélection de notre organisation. Au Nord-Kivu, deux coopératives café sont opérationnelles depuis 2014 : la coopérative Kawa Kanzururu sur les flancs du mont Ruwenzori en territoire de Beni et la coopérative Kawa Kabuya dont les membres se trouvent à la fois en territoire de Lubero et de Beni (chefferie des Bashu).

Renforcer les acquis au nord de la province

Dans le cadre de ce nouveau programme, Rikolto va s’atteler à augmenter le chiffre d’affaires des coopératives Kawa Kabuya et Kawa Kanzururu et à les conduire à l’autonomisation.

La voie pour y parvenir, c’est d’augmenter encore plus la qualité du café pour que les coopératives et leurs membres gagnent encore plus lors de la vente. Ce que nous cherchons, c’est faire en sorte que les coopératives sachent à l’avance la qualité du café proposé aux acheteurs. Car les acheteurs de café gourmet ou de spécialité rémunèrent la qualité. Plus la qualité est élevée, plus la rémunération croit.

L’autre axe, c’est la diversification des contrats avec les acheteurs. La logique est que chacune de ces deux coopératives ait suffisamment d’acheteurs pour que toute la quantité produite soit vite écoulée sur le marché international. Ceci veut dire que la coopérative doit signer des contrats de livraison avant la saison de collecte de café. Et comme livraison implique, en amont, plusieurs activités notamment le traitement du café, il faut des liquidités. C’est là que les créditeurs interviennent. Ce nouveau programme nous permettra de renforcer les liens entre les coopératives et les créditeurs. Les contrats signés en début de saison serviront de garantie pour l’octroi des crédits.

Structuration des caféiculteurs au sud de la province

Grâce au PASA-NK, nous mettons pleinement pied dans le territoire de Rutshuru. Ce territoire a des zones importantes de production de café. Ces zones sont éparpillées. Surtout, elles n’ont pas encore de force économique forte. La structuration est encore au stade embryonnaire. Les fraudeurs font la loi dans la filière café en territoire de Rutshuru. La qualité du café est quasi inexistante, ce qui veut dire qu’il n’y a pas de rémunération de la qualité pour les petits producteurs de café et par conséquent pas d’incitatif à faire mieux. L’insécurité est un autre frein.

Dans le Rutshuru, Rikolto va appuyer les producteurs de café à se regrouper dans une structure économique forte, basée sur les dynamiques existantes. Comme pour les deux entités économiques -coopératives- présentes dans le nord de la province, nous allons connecter celle-ci au marché international du café de spécialité. Pour cela, le traitement de café sera centralisé dans les micro-stations de lavage que les caféiculteurs vont installer avec un co-financement du projet, la même stratégie que celle qui a permis aux deux coopératives du Grand Nord à émerger.

Dans les deux écosystèmes, nord et sud de la province, nous allons travailler avec la Fédération des organisations des producteurs agricoles du Congo au Nord-Kivu, FOPAC-NK et avec la Confédération nationale des producteurs agricoles du Congo, CONAPAC, pour plaider en faveur de l’assainissement du climat des affaires dans la filière café.

Entreprises des pépiniéristes

Et la partie production ? Rikolto s’est fixé un objectif : 10 millions de plantules de café à produire et planter pour renouveler le verger. Car les caféiers sont devenus vieux : la plupart remontent à l’époque coloniale. Ces plantules seront produites et vendues par les pépiniéristes commerciaux sur base des commandes pré-enregistrées de la part des caféiculteurs. Nombreux sont les jeunes intéressés à co-investir dans les micro-entreprises des pépiniéristes pour en faire un maillon durable de la filière.

Les champs-écoles paysans, CEP, seront mis en place aussi bien pour les coopératives actuelles que celle à créer, même pour les non-membres intéressés à participer. Les caféiculteurs vont apprendre les bonnes pratiques culturales pour améliorer le rendement du café. Parmi ces bonnes pratiques, l’usage d’arbres d’ombrage. Ici, le bananier peut faire une bonne association avec le caféier pour constituer une seconde source de revenu. Surtout, les caféiculteurs seront invités à tailler systématiquement le café. Dans la région, cela existait dans le passé, il y a 30 ans. Mais la pratique a disparu avec la chute des prix.

Diversification des produits et acheteurs de café

Nous avons parlé de la commercialisation du café. Rikolto va œuvrer à diversifier les types de produit pour les cafés de spécialité. Présentement, toutes les micro-stations de lavage font du café lavé, le fameux « fully washed ». Les coopératives seront invitées à faire les expérimentations de traitement d’autres types de café dans leurs micro-stations : du café « natural » et du « honey bean ». Le natural est un café traité et séché naturellement, sans enlever la pulpe. Le honey bean est un café qui est séché immédiatement après dépulpage, sans fermentation avec le mucilage toujours sur la fève, donnant un goût plus sucré, comme du miel. La diversification des produits suppose la diversification des acheteurs.

Le dernier volet du PASA-NK, c’est la promotion de la consommation locale de café. Il en va de la viabilité de la filière en RDC. En effet, la filière café est solide dans les pays producteurs de café qui consomment eux-mêmes une majeure partie de leur production. C’est le cas de l’Ethiopie, le pays d’où le café tire son origine. Un pays dont la production de café est consommée localement est à l’abri des fluctuations de la bourse de New-York. Ainsi, les producteurs obtiennent un meilleur prix, stable. Au Congo, pour l’instant, le café consommé sur le plan local n’est rien d’autre que du café importé sous forme soluble dont la qualité n’est pas toujours au rendez-vous. Les consommateurs congolais, dans le cadre de ce programme, seront conviés à s’intéresser à quelques-uns des meilleurs cafés arabica produits au Nord-Kivu et dont raffolent les consommateurs européens et américains. Consommer local et en qualité, ça vous dit quelque chose ?