SRI : développer la riziculture durable au Sud-Kivu

SRI : développer la riziculture durable au Sud-Kivu

01/09/2021

Le système de riziculture intensive, SRI, est vu comme une technologie au service du développement de la riziculture durable dans les provinces du Sud-Kivu et du Tanganyika, à l’Est de la République démocratique du Congo. Ici, grâce au PICAGL, Rikolto en RDCongo diffuse cette technologie d’avenir.

Par: Arsène Nyangezi, agronome basé à Sebele

Le système de riziculture intensive est une approche de production rizicole basée sur une gestion rationnelle des plants, des sols, de l’eau et des nutriments sans trop dépendre des fumures inorganiques. Ayant vu sa naissance à Madagascar, c’est une technologie permettant de produire le riz avec très peu de semences, d’eau, d’engrais, sur un sol riche en matière organique et bien aéré. Son grand avantage réside dans l’apport réduit d’intrants et sa capacité de permettre à la plante d’exprimer au maximum son potentiel de production.

Recherche paysanne pour l’appropriation des savoirs

Dans le cadre de l’appropriation des savoirs, le SRI est une des technologies apprises aux paysans riziculteurs de la province du Sud-Kivu et de Tanganyika en RDC à travers des champs-écoles paysans, CEP, sous l’impulsion du projet PICAGL et l’encadrement de Rikolto.

En effet, contrairement aux méthodes anciennes de transfert technologique, ces champs écoles paysans sont une approche d’apprentissage réservée aux adultes. Ici, on enseigne à des groupes d’agriculteurs comment se livrer à des expériences pour résoudre des problèmes de manière indépendante.

Dans les CEP, 25 producteurs se rencontrent régulièrement au champ avec un facilitateur pour apprendre. Ils préparent et conduisent la culture du riz sur une superficie de 10 à 12.5 ares où ils pratiquent les anciennes (pratiques paysannes) et nouvelles technologies. Les conclusions en découlent grâce aux observations et discussions.

Informations techniques

L’itinéraire technique de la conduite d’un champ suivant la technologie SRI se résume comme suit :

1. Préparation de la semence

La semence est choisie, triée puis prégermée. La semence est trempée dans l’eau pendant un jour, puis enfermée dans un sac pendant deux jours. Cette technique de prégermination permet de stimuler la croissance rapide des plants. Il faut 100 g de semence par are avec cette technique. Préalable : il faut retirer et jeter toute la paille et tous les grains flottant lors du trempage.

2. Pépinière

Il faut préparer le sol des pépinières une journée avant le semis. Pour 1 are à repiquer, construire 1 plate- bande de 10 m2 (1,25m x 8m) bien nivelée en y incorporant 10 kg de fumure organique. Passer au semis en faisant une répartition uniforme des grains et les couvrir avec une mince couche de terre fine et une mince couche de paille (différente de celle de riz), puis arroser. Enlever la paille une semaine après le semis. Préalable : acheter les semences certifiées auprès des multiplicateurs agréés de semence. Placer les pépinières sur des bandes humides, labourées et aplanies.

3. Préparation du champ

La préparation du champ consiste premièrement à aménager les casiers rizicoles, le 1er labour (profond) intervient 3 à 4 semaines avant le semis. Une semaine après le premier labour, il faut mettre de l’eau dans les casiers rizicoles pendant trois jours. Le 2ème labour intervient une semaine avant le repiquage, en incorporant la matière organique à raison de 1 à 1,5 kg/m². Après, va suivre la mise en boue et nivèlement en utilisant une lame d’eau pour vérification juste avant le repiquage.

4. Repiquage

Le repiquage intervient 10 à 14 jours après semis (stade 2 feuilles). A cet âge, les plantules subissent moins de stress et ont plus de pouvoir de taller. Un dépassement du délai conduit à la baisse de la production. Il faut arroser (humidifier) la pépinière au moment de l’arrachage des plants pour éviter de briser les racines. Repiquer ces plants en ligne à raison d’un plant par poquet et aux écartements 25cm x 25cm.

5. Gestion de l’eau

Commencer à irriguer à partir d’une semaine après le repiquage. Maintenir une lame d’eau qui dépasse légèrement le niveau du sol (2 à 3 cm)au cours de la croissance et une lame de 5 cm à la floraison et fructification. Retirer l’eau un jour avant le sarclage et apport d’engrais et la remettre 4 jours après l’application des engrais. Drainer l’eau dans les casiers rizicoles deux semaines avant la récolte.

6. Entretien du champ

Le sarclage se fait à chaque fois que le besoin se fait sentir. Il faut sarcler le plus tôt possible avant que les mauvaises herbes n’envahissent la culture en place, de peur de perdre toute la production. Si le labour a été bien fait, deux à trois sarclages suffisent au cours du cycle. En cas de faible fertilité ou carence, faire recours aux engrais minéraux en faisant un épandage uniforme dans les casiers rizicoles (DAP 10g/m² et urée 10g/m² à faire en deux ou trois applications).

7. Récolte

Le paddy est récolté à maturité (quand les 3/4 supérieurs du rachis ont jauni et que 80 à 85% des panicules sont à maturité physiologique, avec une couleur jaune pâle). La récolte se réalise à temps frais (très tôt le matin de préférence) en coupant les talles à la base. S’ensuit le battage, le séchage, le vannage et le stockage.

8. Rendement obtenu

Remarquons que la technologie SRI a mieux donné que les autres technologies. Les données analysées sont celles de tous les trois bassins du territoire de Fizi (Sebele, Mboko et Katanga). On a remarqué que le SRI donne un très bon rendement sur des sols fertiles que sur les sols infertiles ou en voie d’épuisement.

Certes que nous n’avons pas des données d’analyse de sol, mais par l’œil d’agronome, on sait bien remarquer qu’en gros, les sols de Fizi sont encore bien fertiles en raison du fait que non seulement les champs des basfonds (rizières) sont arrosés par les limons des rivières Mutambala, Nemba et Kasandjala, mais également beaucoup d’autres sont des champs d’ouverture. Cas remarqué également à Kalemie, dans la province voisine du Tanganyika. Ce qui, en conséquence, favorise un rendement élevé et un taux d’adoption très élevé de la technique SRI dans ces contrées comparativement aux autres techniques.

Sur les sols infertiles, utilisez la GIFS

Néanmoins, sur des sols infertiles ou en voie d’épuisement, la GIFS s’avère mieux recommandée. Tel est le cas de la plaine de la Ruzizi, en territoire d’Uvira, et quelques rares endroits de Fizi où la majorité de sols sont en voie d’épuisement à la suite d’une utilisation perpétuelle et sans rotation des cultures.

Celle-ci est également la plus adoptée du fait de son rendement élevé et sa faible demande d’intrants (permettant de réduire le cout de production). En effet, la faible demande en intrant n’est seulement pas liée à l’apport en matière organique, mais également à la quantité de semence apportée. En prenant le cas particulier de Fizi, en moyenne la semence utilisée était de 120 kg par ha comparativement à la technique SRI qui permet de réduire cette quantité à 10 kg (donnant la possibilité d’épargner 110 kg de différence).

Concernant la matière organique, la faible dépendance aux fumures inorganiques prônée par la technique est d’ordre écologique. Cependant, la matière organique fait souvent défaut. Il en faut en grande quantité alors qu’elle est rarement disponible. Pour faire face à cette pénurie de la matière organique, il est recommandé de faire recours aux engrais minéraux, mais en optimisant leur utilisation par application en duo matière organique – engrais minéral.

Le grand risque du non-respect de la prescription en apport d’engrais est l’épuisement rapide de la fertilité du sol (exportation par les cultures) ainsi que la réduction au fur et à mesure du rendement. Ce qui finirait par l’abandon de la technique.